• volsunga saga

    Ensuite Sigurd reprit sa chevauchée.

    Son bouclier était feuilleté, flamboyant d'or rouge, et l'image d'un dragon était peinte dessus, brun sombre vers le haut et rouge brillant au-dessous. Et cette image ornait également son heaume, sa selle, et son tabard. Il était sanglé dans son armure dorée, et toutes ses armes étaient forgées d'or. Grâce au dragon peint sur toutes ses armes, lorsque les gens le voyaient, ils savaient qui venait à eux. Car tous savaient qu'il avait pourfendu le grand dragon que les Voerings nommaient Fafnir, et pour quelle raison ses armes étaient forgées d'or, et pourquoi leur teinte était brune, et qu'il était bien supérieur aux autres hommes pour la courtoisie et les bonnes manières, et presque dans tous les autres domaines. Et lorsqu'ils parlaient des plus puissants des champions et des chefs les plus nobles, il était toujours nommé en premier, car son nom était connu dans toutes les langues au nord de la mer du pays des grecs, et il devrait en être ainsi tant que le monde durerait.

    La chevelure de Sigurd était de teinte roux-doré, brillante de nature, et tombait en longues mèches. Sa barbe était épaisse et courte, de la même couleur, le nez haut placé, le visage large aux paumettes hautes. Ses yeux étaient si vifs que peu osaient les fixer sous ses sourcils. Ses épaules étaient aussi larges que celles de deux hommes. Son corps était des mieux proportionnés entre hauteur et largeur, et paraissait de cette manière des plus convenables. Et la preuve de sa haute taille est que lorsqu'il était ceint de son épée Gramr, qui elle-même mesurait sept empans1 de long, et qu'il marchait dans les champs de seigle à maturité, la chappe de la-dite épée heurtait les hautes barbes des céréales. Et en plus de cela, sa force était supérieure à sa taille. Ainsi pouvait-il manier l'épée, et jeter la lance au loin, envoyer des javelots et porter le bouclier, bander l'arc, monter à cheval, et réaliser tout ce qui lui avait été enseigné pendant sa jeunesse.

    Sage, il pouvait avoir la prescience d'événements à venir. Et comprenant le langage des oiseaux, il pouvait difficilement être surpris. Il parlait avec facilité, et était si habile en son discours que chaque fois qu'il prenait la parole, il ne cessait jamais de parler que tous ses auditeurs ne fussent convaincus que les choses étaient bien telles qu'il le disait. Son tempérament et son plaisir étaient d'aider ses semblables, et de faire la preuve de sa puissance, de s'emparer des richesses de ses ennemis et de la distribuer à ses amis. Jamais il ne perdait courage, et il n'avait peur de rien.

     

    1: Soit 1,40 m

     

    sigurd fafnisbani

    Sigurd vainqueur de Fafnir

     

    volsunga saga                                                                                                                    volsunga saga


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  •  volsunga saga 

    sigurd à hlymdale, volsunga saga

     

    Sigurd poursuivit sa route jusqu'à ce qu'il parvienne à une grande et belle demeure, dont le seigneur était un noble chef nommé Heimir. Il avait pour épouse une sœur de Brunehilde, la digne Brekkhild, parce qu'elle avait été invitée dans cette maison et y avait appris à travailler de ses mains, tandis que Brunehilde courait les champs de bataille avec heaume et armure, raison pour laquelle elle avait été nommée Brunehilde1.

    Heimir et Brekkhild avaient un fils commé Alsvid, le plus courtois des hommes.

    A cet endroit se trouvaient des hommes s'exerçant aux alentours, mais lorsqu'ils virent cet homme chevauchant vers eux, ils quittèrent leurs entraînements pour s'enquérir de lui, étant donné que nul ne l'avait jamais vu auparavant. Ils vinrent donc à sa rencontre, et lui souhaitèrent la bienvenue. Alsvid l'invita à entrer, et il lui mit dans les mains le présent qui convenait. Il l'accepta de bon cœur. Puis un service particulier fut mis à sa disposition : quatre hommes déchargèrent le trésor du dos du cheval, et un cinquième fut affecté à sa garde. Il y avait là tant d'objets à voir, tant de choses rares et de grand prix, que les hommes prirent grand plaisir et joie à admirer les armures et les heaumes, et les lourds anneaux, et de prodigieuses coupes d'or, et toutes sortes d'armes de guerre.

     

    le trésor de Fafnir

     

    Sigurd résida longtemps à cet endroit, traité avec grand honneur. Et les nouvelles de ses actes de bravoure se répandirent dans tous les pays, le récit de la manière dont il avait tué ce terrible et hideux dragon. Et ils partageaient ensemble la même vraie joie, et chacun était loyal envers l'autre. Leurs distractions étaient l'apprêtement de leurs armes, et le tir à l'arc, et le vol de leurs faucons.

     

    1  Brynhilde : celle qui porte la broigne.

     

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  • volsunga saga

    Durant son séjour arriva chez Heimir Brunehilde, la fille adoptive de ce dernier, qui résida dans son boudoir avec ses suivantes, et montra plus de talent dans les travaux manuels que les autres femmes. Elle était assise, couvrant d'or une toile, et brodant dessus les grandes prouesses accomplies par Sigurd, la mort du ver, et la prise de ses richesses, et la fin de Reginn.

    Un jour, raconte la légende, Sigurd chevauchait dans les bois un faucon au poing avec son chien courant, et une foule d'hommes. Et alors qu'il rentrait à la maison, il arriva que son faucon s'envola et se percha sur une fenêtre. Sigurd chevaucha à la poursuite de son oiseau, et aperçut à cet endroit une belle femme, qu'il reconnut pour Brunehilde, et tout ce qu'il vit d'elle lui sembla aimable, à la fois sa distinction, et les splendides œuvres qu'elle confectionnait. Lorsqu'il rentra à la halle, il n'éprouvait plus aucune joie aux distractions des hommes.

    Alors parla Alsvid :

    "- Pourquoi sembles-tu si dénué de joie ? Ton humeur met tes amis en grand souci. Pourquoi n'es-tu pas resté sur les chemins de ton bonheur ? Regarde, ton faucon se languit à présent, et ton cheval Grani se ramollit. Et combien de temps cela durera-t-il jusqu'à ce que nous nous débarrassions de cette langueur ?"

    Sigurd répondit :

    "- Mon bon ami, écoute ce qui gît dans mon esprit : parce que mon faucon s'est enfui dans une tour, j'y suis allé et l'ai repris, et je vis alors une belle femme, et elle se livrait à des travaux d'aiguille avec de l'or, et représentait mes actes passés et mes actes à venir."

    Alsvid répondit : "- Tu as vu Brunehilde, la fille de Budli, la plus noble des grandes dames."

    "- Oui, en vérité, dit Sigurd, mais comment est-elle venue ici ?"

    Alsvid répondit : "- Il s'est écoulé peu de temps entre ton arrivée et la tienne."

    Sigurd dit : "- Oui, voici peu de jours, je l'ai reconnue comme la meilleure de toutes les femmes du monde."

    Alsvid dit :"- Ne concentre pas toute ton attention sur une seule femme, pas un homme tel que toi. C'est une bien triste vie que de la passer assis à se lamenter pour ce qu'on ne peut pas avoir."

    "- Je dois la rencontrer, dit Sigurd, et en obtenir un amour semblable au mien, et lui en donner un gage d'or."

    Alsvid répondit : "- On ne connait personne qu'elle autoriserait à prendre place près d'elle, ou à qui elle accepterait d'offrir à boire. Elle semble s'en tenir pour toujours à faire la guerre et à conquérir la gloire."

     

    Brunehilde, Robert Engels.

    Brunehilde, par Robert Engels.

     

    Sigurd dit : "- Nous ne pouvons pas savoir ce qu'elle nous donnera comme réponse, ni si elle nous permettra de prendre place à ses côtés."

     

    Alors, le lendemain, Sigurd se rendit au salon, mais Alsvid resta devant la porte, taillant des flèches pour son arc.

    Sigurd prit la parole : "- Bonjour, belle et radieuse dame, comment te portes-tu ?"

    Elle répondit : "- Cela va bien. Ma famille et mes amis sont toujours en vie. Mais qui peut dire jusqu'à quand vivent les gens heureux ?"

    Il s'assit près d'elle, et entrèrent alors quatre demoiselles avec de grands hanaps d'or emplis du meilleur vin. Et elles les leur présentèrent à tous deux.

    Alors Brunehilde : "- Ce siège accueille peu de personnes, à part mon père s'il vient."

    Il répondit : "- Oui, il est accordé à celui que tu apprécies."

    La pièce était tendue des plus belles et meilleures draperies, et le sol lui-même était couvert d'étoffes.

    Sigurd parla : "- Maintenant, les choses se déroulent ainsi que tu l'as promis."

    "- Oh, soit le bienvenu ici !" dit-elle, et elle leva une coupe, et les quatre demoiselles avec elle, et la lui proposa, lui demandant de boire. Il étendit la main vers le hanap, le prit, et sa main avec. Il l'attira à lui, jeta les bras autour de son cou et l'embrassa, et dit :

    "- Tu es la plus aimable personne qui soit jamais née !"

    Mais Brunehilde dit :

    "- Ah, il n'est guère sage de placer sa foi et sa confiance en la puissance d'une femme, car elles peuvent briser la parole qu'elles ont donnée."

    Il répondit : "- Ce jour devrait voir se lever les meilleurs des jours au-dessus de nos têtes, pendant lesquels chacun devrait rendre l'autre heureux."

    Brunehilde répondit : "- Il n'est pas écrit que nous devions vivre ensemble. Je suis une vierge au bouclier, et je mets le heaume sur ma tête aussi souvent que les rois de la guerre, que j'aide souvent, sans que la bataille ne me devienne jamais odieuse."

    Sigurd répondit : "- Que serait notre vie, si nous ne vivions pas ensemble. Il serait plus difficile de supporter cette peine que d'être frappé par une épée acérée."

    Brunehilde reprit : "- Je veillerai sur les soldats des rois de la guerre, et tu épouseras Gudrun, la fille de Gjuki."

    Sigurd demanda : "- Mais quelle fille de roi pourrait me séduire ? Je ne suis en rien pourvu d'un cœur hypocrite. Et je jure à présent par les dieux que tu seras mienne, ou nulle autre femme."

    Et elle s'engagea de la même manière.

    Sigurd la remercia pour sa parole, et lui donna un anneau d'or, et ils échangèrent à nouveau des serments. Il retourna alors vers ses hommes, et resta quelque temps avec eux, dans une grande félicité.

     

    Brunehilde et Sigurd. J. Nystrom.

    Brunehilde et Sigurd. J. Nystrom.

     

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