• Heimskringla : Saga de Magnus Berrfoettr II

    Heimskringla, snorri sturluson, magnus le déchaux

    8- Du bondi Sveinke et de Sigurd Ulstreng

    Il y avait un homme nommé Sveinke Steinarson, qui était très riche et résidait à Viken sur la rivière Gaut. Il avait élevé Hakon Magnuson avant que Thorer de Steig ne le prenne avec lui. Sveinke n'avait pas encore fait allégeance au roi Magnus. Le roi manda Sigurd Ulstreng et lui dit qu'il l'envoyait auprès de Sveinke pour lui signifier de quitter les terres et domaines du roi.

    "- Il n'a pas fait acte de soumission à notre endroit, ni ne nous a montré le respect qui nous est dû." Il ajouta qu'il y avait quelques fermiers dans l'est de Viken, plus précisément, Svein Bryggjufot, Dag Eilifson, et Kolbjorn Klakke qui pourraient remettre cette question dans le droit chemin. Alors Sigurd dit : "- Je ne pensais pas qu'il existait en Norvège un homme contre lequel il serait nécessaire de faire intervenir trois hommes en plus de moi."

    Le roi répliqua : "- Tu n'as besoin d'accepter cette aide que si elle te semble nécessaire."

    Alors Sigurd se prépara pour le voyage, prit un navire et vogua vers Viken, où il appela les métayers auprès de lui. Un Thing fut alors convoqué à Viken, auquel furent invités ceux qui vivaient les uns près des autres auprès de la rivière Gaut ; aussi, ce fut une assemblée nombreuse. Lorsque le Thing fut réuni, il fallut attendre Sveinke. Peu après, on vit arriver une troupe d'hommes, bien équipés d'armes qui semblaient de glace étincelante. Ainsi vinrent Sveinke et ses hommes au Thing, et ils s'installèrent en cercle. Tous étaient couvert de fer, avec des armes luisantes, et ils étaient au nombre de cinq cents.

    Alors Sigurd se leva, et prit la parole : "- Mon maître, le roi Magnus, envoie les salutations de Dieu et les siennes à tous ses amis, fermiers et autres, ses sujets dans le royaume. De même aux boendr puissants, et au peuple en général, avec des mots aimables et des propositions d'amitié. Et il offre son amitié et sa bonne volonté à tous ceux qui lui obéiront. Maintenant, le roi, avec gaité et paix, veut se montrer un maître gracieux pour ceux qui se soumettront à lui, et à tous ceux qui se trouvent dans ses domaines. Il sera le chef et le défenseur de tous les hommes de Norvège, et il sera bon pour vous d'accepter son affable parole, et cette offre."

    Alors un homme se leva de la troupe des Elfgrims, qui était de haute stature et de visage sombre, vêtu d'un manteau de cuir, portant hallebarde sur l'épaule et un grand chapeau d'acier sur la tête. Il le regarda fixement, et dit : "- Il n'est nul besoin de roues, dit le renard, quand il tend le piège sur la glace." Il n'ajouta rien d'autre, et se rassit.

    Peu après, Sigurd se leva à nouveau, et parla ainsi : "- Nous avons peu de souci de vous et pas besoin d'aide de votre part en ce qui concerne les affaires du roi, Elfgrims, ni beaucoup d'amitié pour vous. Et pourtant, ce sont par de tels moyens que que chacun montre combien il se respecte lui-même. Mais à présent, je dois expliquer plus clairement quelle est la demande du roi." Puis il demanda les taxes foncières et les impôts, ainsi que les autres droits du roi, de la part des boendr. Il demanda à chacun de considérer la manière dont il s'était comporté à cet égard, et de mettre à présent son propre honneur en avant, et la justice du roi, s'ils avaient été un peu courts sur cette question jusque là. Et puis il s'assit.

    Alors le même homme de la troupe des Elfgrims qui avait parlé auparavant, souleva légèrement son chapeau, et dit : "-Les gamins glissent vite, disent les Lapons, qui ont des patins pour rien". Puis il se rassit à nouveau.

    Peu après Sigurd se leva, après s'être entretenu avec les métayers, et déclara qu'un message de poids comme celui d'un roi ne devait pas être traité à la légère comme une plaisanterie. Il était à présent un peu en colère, et ajouta qu'un message et un ordre du roi ne devaient pas être reçus avec tant de mépris, car c'était indécent. Il était vêtu d'un manteau rouge ou écarlate, recouvert par un autre de teinte bleue. Il ôta ce dernier, et dit : "- Les choses sont maintenant allées assez loin pour que chacun regarde en lui-même, et ne plaisante ou ne discutaille plus avec les autres. Car chacun doit montrer ce qu'il est. Nous n'avons pas besoin aujourd'hui de nous laisser dicter notre conduite par les autres. Car nous pouvons voir par nous-mêmes la manière dont nous devons être considérés. Cela peut être supporté, mais pas de traiter aussi dédaigneusement le message du roi. Car ainsi, chacun montre avec hauteur comment il se considère lui-même. Il y a un homme nommé Sveinke Steinarson, qui vit à l'est de la rivière Gaut. Et le roi veut de lui son juste dû, ainsi que sa terre, sinon il sera banni du pays. Il n'est nul besoin de se chercher des excuses, ou de répondre avec des mots tranchants, car il se trouve des personnes qui sont ses égaux en puissance et qui pourtant ne reçoivent pas nos paroles de si mauvais gré. Et il serait meilleur à présent de revenir dans le droit chemin, et de faire preuve d'honneur, plutôt que d'attendre la disgrâce pour son obstination." Et il se rassit.

    Sveinke se releva, jeta son chapeau d'acier en arrière, et proféra des mots de mépris pour Sigurd : "- Tut ! Tut ! C'est une honte pour les chiens, dit le proverbe, lorsque le renard est autorisé à jeter ses déjections dans le puits du paysan. Ici se produit un miracle ! Compagnon inutile ! Avec un manteau, sans armes, et avec un vêtement fait de jupes, tu veux m'envoyer hors du pays ? Ton parent, Sigurd Sac de Laine, a été envoyé ici auparavant pour cette mission, et un autre nommé Gille Dos de Voleur, et un autre, qui portait un nom pire encore. Ils se rendirent de nuit dans toutes les maisons, et volèrent où qu'ils allassent. Tu vas m'expulser du pays ? Jadis, tu n'étais pas si puissant, et ta fierté était bien moindre lorsque le roi Hakon, mon fils adoptif, était en vie. Il t'a tant effrayé lorsqu'il t'a rencontré sur la route, comme une souris dans un piège à souris, que tu t'es caché sous un tas de vêtements, comme un chien à bord d'un navire. Tu t'es tassé dans un sac de cuir, tel du blé dans un ballot, et a été chassé de la ferme, comme un poulain d'un an l'est loin des juments. Et tu prétends m'exiler hors du pays ? Tu devrais plutôt t'estimer heureux de pouvoir partir d'ici en vie. Debout, et attaquons-le !"

    Alors tous ses hommes se levèrent, et firent grand bruit avec leurs armes. Alors Svein Bryggjufot et les autres fermiers virent qu'il n'y avait aucune autre possibilité pour Sigurd que de le mettre à cheval, ce qui fut fait, et il chevaucha jusqu'à la forêt. A la fin, Sveinke rentra chez lui, et Sigurd Ulstreng retourna, avec bien des difficultés et en passant par le nord, à Throndhjem, auprès du roi Magnus, auquel il raconta le résultat de son expédition.

    "- N'avais-je pas dit, fit le roi, que l'aide de mes métayers pourrait être nécessaire ?"

    Sigurd était fort dépité de son voyage, et insista pour se venger, quoiqu'il en coûtât, et pressa le roi en ce sens. Le roi ordonna que cinq vaisseaux soient équipés, et dès qu'ils furent prêts à prendre la mer, partit vers le sud le long de la côte, puis vers l'est et Viken, où il fut reçu par ses fermiers dans de belles maisons d'hôtes. Le roi leur dit qu'il voulait partir à la recherche de Sveinke.

    "- Car je ne cèlerai pas que je le soupçonne de vouloir devenir lui-même roi de Norvège."

    Il répondirent que Sveinke était un homme à la fois puissant et impossible à gouverner. Alors le roi partit de Viken pour la ferme de Sveinke. Les fermiers demandèrent à être laissés sur la rive, d'où ils pourraient voir comment la situation évoluait. Mais lorsqu'ils arrivèrent à terre, ils se rendirent compte que Sveinke avait déjà quitté la ferme, et se trouvait sur la route avec bon nombre d'hommes bien armés. Les fermiers hissèrent un bouclier blanc en l'air en signe de paix. Et lorsque Sveinke le vit, il arrêta ses hommes, et ils s'approchèrent les uns des autres. Alors Kolbjorn Klakke dit : "- Le roi Magnus t'envoie les salutations de Dieu et les siennes, te prie de considérer ce que tu es en train de devenir et de lui obéir, et de ne pas te préparer à lui livrer bataille." Kolbjorn proposa de servir de médiateur entre eux, s'il le pouvait, et lui demanda d'arrêter ses troupes.

    Sveinke répondit qu'il attendrait là où il se trouvait. "- Nous sommes venus vous rencontrer, dit-il, afin que vous ne piétiniez pas notre blé."

    Les fermiers retournèrent auprès du roi et l'informèrent que tout était désormais selon son bon plaisir.

    Le roi dit : "- Le message de mon jugement est vite délivré. Il doit fuir le pays, et ne jamais revenir en Norvège tant que le royaume sera mien, et il doit laisser tous ses biens derrière lui. "

    "- Mais ne serait-il pas meilleur pour votre honneur, dit Kolbjorn, et pour acquérir une réputation plus grande parmi les autres rois, si, tout en le bannissant du pays, vous l'autorisiez à conserver ses biens, et à se montrer parmi les autres peuples ? Et nous prendrons prendre garde à ce qu'il ne revienne jamais, tant que nous vivrons. Réfléchissez-y par vous-même, Sire, et soyez assuré de notre respect."

    Le roi répliqua : "- Alors, qu'il parte immédiatement."

    Ils s'en retournèrent alors vers Sveinke, et lui rapportèrent les paroles du roi. Et aussi que le roi ordonnait qu'il quitte immédiatement le pays, et qu'il lui témoigne son obéissance, car il s'était oublié vis à vis du roi. "- C'est pour l'honneur de tous les deux qu'il faut que tu te montres obéissant au roi."

    Alors Sveinke dit : "- Il a dû y avoir de grands changements, pour que le roi me parle aussi aimablement. Mais pourquoi devrais-je fuir le pays et mes propriétés ? Ecoutez à présent ce que je dis. Il me semble préférable de mourir sur mes terres que d'avoir à quitter mes propriétés ancestrales. Dites au roi que je n'en bougerai pas, même sous une volée de flèches."

    Kolbjorn répondit : "- Ceci n'est guère prudent, ou juste. Car il est préférable pour l'honneur de chacun de céder au meilleur chef, que de courir à sa perte en s'y opposant. Un homme brave réussit où qu'il aille. Et tu seras le plus respecté où que tu ailles, des hommes de pouvoir, juste parce que tu as tenu tête si hardiment à un chef si puissant. Ecoute nos assurances, et prête plus attention à notre mission. Nous t'offrons de gérer tes établissements, et de les prendre loyalement sous notre protection. Nous engagerons nos vies et nos biens là dessus. Ne rejette pas les bons conseils, et évite ainsi le mauvais sort d'autres hommes de bien."

    Sveinke garda le silence un court laps de temps, et dit enfin : "- Vos efforts sont guidés par la sagesse. Mais je vous soupçonne d'avoir quelque peu modifié le message du roi. Prenant néanmoins en considération la bonne volonté dont vous faites preuve à mon égard, je vais tenir compte de vos conseils et quitter le pays pendant tout l'hiver, si, selon vos promesses, il m'est possible de conserver paisiblement mes domaines. Rapportez mes paroles au roi, et dites-lui que je consens pour vos efforts, non pour les siens."

    Ils retournèrent auprès du roi et lui dirent que Sveinke s'en remettait aux mains du roi. "- Mais il vous prie de bien vouloir respecter son honneur. Il s'en va pour trois ans, puis il reviendra, si telle est la volonté du roi. Qu'il en soit ainsi et que tout se déroule selon la volonté royale et selon notre prière, puisque maintenant l'affaire est entièrement entre vos mains, et que nous devons tout faire pour éviter que la situation ne se retourne contre votre volonté."

    Le roi répondit : "Vous traiterez cette affaire en hommes, et selon vos intérêts, et que tout se passe selon vos désirs. Dites-le lui."

    Ils remercièrent le roi et retournèrent auprès de Sveinke, et lui firent part des intentions pleines de grâce du roi. "- Nous serions fort heureux, dirent-ils, si vous vous réconciliiez. Le roi demande, cependant que ton absence dure trois années, mais, si nous voyons bien la réalité, nous nous attendons à ce qu'il se rende compte avant ce temps qu'il ne peut se passer de toi dans cette région du pays. Il serait bon pour ton honneur à venir, alors, que tu y consentes."

    Sveinke répondit : "- Quelles conditions pourraient être meilleures que celles-ci ? Dites au roi que je ne vais pas le contrarier en restant ici plus longtemps, et prenez mes biens et établissements à cette condition."

    Puis il rentra chez lui avec ses hommes, et s'en alla aussitôt. Car il avait tout préparé d'avance. Kolbjorn resta en arrière, et apprêta une fête pour le roi Magnus, qui y avait aussi pensé et s'y attendait. Sveinke, de son côté, chevaucha vers le Gautland avec les hommes dont il pensait qu'ils étaient aptes à l'accompagner. Le roi resta dans sa maison tant que durèrent les festivités, puis retourna à Viken, et les biens de Sveinke devinrent en droit ceux du roi, mais Kolbjorn en eut la gérance. Le roi fut installé dans une maison d'hôtes à Viken, puis repartit vers le nord, et la paix s'instaura quelque temps. Mais, à présent que les Elfgrims étaient dépourvus de chef, des bandes de maraudeurs envahirent la région, et le roi s'aperçut que cette partie est du royaume risquait d'être mise en coupe réglée. Il lui apparut alors des plus approprié et sage de faire en sorte de Sveinke lui-même endiguât ce flot, et il lui envoya des messages par deux fois. Mais il ne bougea pas jusqu'à ce que le roi lui-même vînt dans le sud du Danemark, où Sveinke et le roi se rencontrèrent, et se réconcilièrent pleinement. Sur quoi Sveinke regagna sa demeure et ses établissements, et resta par la suite le meilleur et le plus loyal des amis du roi Magnus, dont il renforça le royaume à sa frontière est. Leur amitié dura tant qu'ils vécurent.  

     

    Heimskringla, snorri sturluson, magnus le déchaux                                                                                                                     Heimskringla, snorri sturluson, magnus le déchaux


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