• Heimskringla : Saga d'Olaf Tryggvason XVIII

    Heimskringla, snorri sturluson, olaf tryggvason

    115- La bataille commence

    Les rois firent alors relever les rames, et se préparèrent à attaquer (1000). Le roi Svein disposa son navire contre le Long Serpent. Plus loin de lui, Olaf de Suède se prépara, et plaça la poupe de son vaisseau contre le navire le plus extérieur de la ligne du roi Olaf. Et de l'autre côté se rangea le jarl Eirik. Alors un difficile combat commença. Le jarl Sigvald se tint en retrait avec les rames sorties, mais ne rejoignit pas la bataille. Ainsi en parla Skule Thorsteinson, qui était en ce temps aux côtés du jarl Eirik :

    "J'ai pendant ma jeunesse accompagné Sigvald,

    Et le vaillant Eirik, et à dire le vrai,

    Maintenant que je suis devenu raide et vieux,

    Pour le chant des lances j'étais autrefois brave.

    Là où les flèches chuintaient sur le rivage

    Du fjord de Svolder j'arborais mon bouclier,

    Me tenant au milieu de l'assaut furieux

    Quand l'épée déchaînait sa clameur sur les targes."

     

    Et Halfred chanta ainsi :

    "En vérité je crois que le superbe roi

    Au milieu d'une telle assemblée d'ennemis

    Put être respecté comme étant le meilleur

    Dans les lignes serrées de ses gars de Throndhjem.

    Car nombreux sont les chefs qui s'esquivèrent et fuirent,

    Lâchant notre courageux roi dans la mêlée,

    Face à la puissance de deux grands souverains,

    Et d'un jarl influent, avec son petit groupe,

    Le roi qui a osé une telle prouesse

    Devra pour son scalde devenir un héros."

     

    Heimskringla, snorri sturluson, olaf tryggvason, svolder

    La bataille de Svolder. Otto Sinding.

     

    116- La fuite de Svein et d'Olaf de Suède

    Cette bataille fut une des plus rudes à avoir jamais été rapportée, et innombrables furent les morts. Les hommes du gaillard d'avant du Long Serpent, du Petit Serpent et de la Grue jetèrent des grappins et des chaînes sur le navire du roi Svein, et utilisèrent bien leurs armes contre les hommes qui se tenaient face à eux, car ils libérèrent les ponts de tous les navires sur lesquels ils purent prendre pied. Et le roi Svein, et tous les hommes qui s'enfuirent, rejoignirent d'autres vaisseaux, et se tinrent à l'écart des tirs d'arc. Il en alla de cette force tout comme le roi Olaf Tryggvason l'avait prévu. Puis le roi Olaf de Suède vint prendre sa place. Mais lorsqu'il parvint auprès des grands navires, il en alla pour lui comme pour les Danois, car il perdit nombre d'hommes et quelques vaisseaux, et fut obligé de s'échapper. Mais le jarl Eirik plaça son bateau bord à bord avec le navire le plus extérieur de la flotte du roi Olaf, en décima l'équipage, trancha ses câbles et le laissa dériver. Puis il se rangea le long du suivant, et livra bataille jusqu'à l'avoir vidé de ses hommes également. A ce moment, tous ceux qui se trouvaient sur les petits vaisseaux se repliaient sur les grands, et le jarl les libérait aussitôt qu'il en avait éliminé tous les hommes. Les Danois et Suédois se tenaient à présent hors de portée de tir tout autour des vaisseaux d'Olaf. Mais le jarl Eirik restait toujours bord à bord au plus près des bateaux, et utilisait les épées et les haches de bataille, et dès que ses hommes tombaient dans ses vaisseaux, d'autres, Danois et Suédois venaient à leur place.

    Ainsi en parla Haldor le Peu-Chrétien :

    "Epées et boucliers cliquetaient vivement,

    Et la chanson des lances à bord était stridente

    Et les flèches sifflaient en essaims resserrés

    Contre les courageux combattants du Serpent,

    Et toujours, a-t-on dit, le jarl Eirik pouvait

    Aligner à ses côtés des ennemis frais,

    Des armées entières de Danois et Suédois,

    Maniant haut les lames bleues de leurs épées."

     

    Alors le combat devint encore plus âpre, et beaucoup d'hommes tombèrent. Et à la fin, il advint ceci, que tous les navires du roi Olaf Tryggvason furent vidés de leurs hommes à part le Long Serpent, à bord duquel étaient réunis tous ceux qui pouvaient encore porter les armes. Alors le le jarl Eirik disposa son navire à côté du Serpent, et le combat se poursuivit à l'épée et à la hache de bataille. Ainsi en parla Haldor :

    "Enserré de tous côtés par des ennemis,

    Le Serpent vacilla sous les coups, les assauts.

    Les targes s'écrasaient tout autour de la proue !

    Torses et cuirasses percés de part en part !

    Dans l'orage des lames, auprès du chêne vert1

    Le navire du jarl vint se ranger tout près

    Du royal Long Serpent, souverain de la mer.

    La destinée donna au comte la victoire."

     

    Heimskringla, snorri sturluson, olaf tryggvason, svolder

     

    117- Du jarl Eirik

    Le jarl Eirik était à l'avant de son navire, où un rempart2 de boucliers avait été dressé. Lors du combat, les armes tranchantes, épées, et haches, de même que la poussée des lances, avaient été utilisées. Et tout ce qui avait pu être jeté comme missiles l'avait été. Certains faisaient usage de l'arc, d'autres lançaient les javelots à la main. Tant d'armes avaient été envoyées dans le Serpent, et les lances et flèches avaient volé si serrées, que les boucliers pouvaient difficilement les arrêter toutes, car le Long Serpent était de tous côtés cerné par des navires de guerre. Alors les hommes du roi Olaf devinrent fous de fureur, à tel point qu'ils coururent à l'abordage des vaisseaux ennemis, pour rejoindre les hommes et les tuer à coups d'épée. Mais nombreux étaient ceux qui ne se tenaient pas si près du Long Serpent, afin d'échapper à une rencontre trop rapprochée avec une épée ou une hache. En conséquence, la plupart des hommes d'Olaf passèrent par-dessus bord et coulèrent avec leurs armes, pensant combattre sur la terre ferme.

    Ainsi en parla Halfred :

    "Les gars audacieux ne fuirent pas la mort

    Sautant par dessus bord et sombrant au-dessous

    De la quille du Serpent, sautant tout armés,

    Et coulent vers le bas à cinq brasses de fond.

    L'ennemi fut intimidé par leur clameur.

    Le roi, resté encor le maître du Serpent,

    Pris dans le détroit, en proie à l'ennemi,

    Aurait voulu bien plus d'hommes comme ceux-là."

     

    Heimskringla, snorri sturluson, olaf tryggvason, svolder

    La bataille de Svolder. P.N. Arbo

     

    118- D'Einar Tambarskelver (Secoue-Panse)

    Einar Tambarskelver, un des plus brillants archers, se tenait près du mât, et tirait à l'arc. Einar décocha une flèche sur le jarl Eirik, qui frappa la barre juste au dessus de la tête du jarl et en pénétra le bois jusqu'à la hampe. Le jarl s'en avisa et demanda si l'on savait qui avait tiré ainsi. Et au même moment, une autre flèche vola entre sa main et son flanc, et se ficha dans le rembourrage de son siège, de telle sorte que son fer dépassa loin de l'autre côté. Alors le jarl dit à un homme nommé Fin – mais qui en fait était de la race de Finn (laplandais), et était un excellent archer - "Tire sur ce grand homme près du mât". Fin tira, et sa flèche toucha le milieu de l'arc d'Einar juste au moment où il le bandait, et l'arc fut brisé en deux.

    "Qu'est-ce qui s'est brisé avec un tel bruit ?" cria le roi Olaf.

    "La Norvège, roi, s'est échappée de tes mains" rétorqua Einar.

    "Non, pas encore tant que ça", dit le roi, "prends mon arc et tire", et il lui jeta l'arc.

    Einar prit l'arc, et le banda au-delà de la tête de la flèche.

    "- Trop faible, trop faible", dit-il, "pour l'arc d'un puissant roi", et, jetant l'arc de côté, il prit épée et bouclier et combattit vaillamment.

     

    Heimskringla, snorri sturluson, olaf tryggvason, einar tambarskelver  

    "Trop faible, trop faible !". C. Krohg.

     

    svolder, einar tambarskelver

    Louis Moe.

     

    119- Olaf donne des épées acérées à ses hommes

    Le roi se tenait sur les coursives du Long Serpent et tira la majeure partie de la journée, parfois avec l'arc, parfois au javelot, jetant alors toujours deux lances à la fois. Il jeta un coup d'oeil par-dessus les bord du bateau, et vit que ses hommes frappaient à la ronde avec leurs épées, et blessaient quelquefois, mais rarement. Alors il cria : "- Pourquoi frappez-vous si doucement que vous ne touchez que rarement ?" Un parmi ses hommes répondit : "- Les épées sont émoussées et pleines d'entailles." Alors le roi se rendit au gaillard d'avant, ouvrit le coffre sous le trône, et en sortit de nombreuses épées aiguisées, qu'il tendit à ses hommes. Puis comme il étirait son bras droit en les portant, on put observer que du sang coulait de son gant d'acier, mais personne ne savait où il était blessé.

     

    Heimskringla, snorri sturluson, olaf tryggvason, svolder

     

    120- L'abordage du Serpent.

    Désespérée était la défense à bord du Serpent, et c'est par l'équipage de la proue et du pont avant que la plus grande tuerie d'hommes avait lieu, car en ces deux endroit, les hommes avait été choisis, et le navire était plus haut, mais vers le centre du bateau, le nombre des combattants se réduisait beaucoup. Lorsque le jarl Eirik vit qu'il ne restait plus grand-monde autour du mât, il décida l'abordage. Et il entra sur le Serpent avec quatre hommes. Vinrent contre lui Hyrning, le beau frère du roi, et quelques autres, et ce fut un combat des plus acharnés. Et à la fin, le jarl fut obligé de sauter en arrière à bord de son propre navire, et certains de ceux qui l'avaient accompagné furent tués, et les autres blessés. Thord Kolbeinson y fait allusion :

    "Sur les planches d'Odin, tout humides de sang,

    Se tenait le héros au casque décoré

    Et le vaillant Hyrning y acquit son honneur

    Les libérant de son épée toute teintée.

    Les plus hautes montagnes devront s'écrouler

    Avant que l'on n'oublie de rappeler ces faits."

     

    Heimskringla, snorri sturluson, olav tryggvason, svolder

    L'abordage du Long Serpent. H. Egedius.

     

    Puis le combat devint plus chaud, et de nombreux hommes tombèrent à bord du Serpent, et les hommes à son bord commencèrent à être décimés, et la défense s'affaiblit. Le jarl résolut d'aborder à nouveau, et reçut encore une fois une réception brûlante. Lorsque les hommes du gaillard d'avant du Serpent virent ce qui se passait, ils rappliquèrent à l'arrière et se battirent avec la dernière énergie, mais tant d'hommes du Serpent étaient tombés que les côtés du navire étaient en plusieurs endroits dépourvus de défenseurs. Et les hommes du jarl déferlaient de partout sur le vaisseau, et tous les hommes qui étaient encore capables de le défendre se regroupaient autour du roi, et se rangeaient d'eux-mêmes pour sa défense.

     

    Heimskringla, snorri sturluson, olaf tryggvason, svolder

     

    Ainsi dit Haldor le Peu Chrétien :

    "Eirik clame à ses hommes :

    "- A nouveau, à la charge !"

    Les quelques courageux

    Des combattants d'Olaf

    Doivent trouver refuge

    Sur le gaillard d'arrière.

    Tout autour de leur roi

    Disposés en anneau,

    Protégeant de leurs targes

    Le roi de l'ennemi,

    Et quelques survivants

    Frappent, fous mais en vain.

    Eirik clame à ses hommes :

    "- A nouveau, à la charge !"

     

    1 Heiti pour "bateau".

    2 Voir la technique de la tortue des romains.

     

    Heimskringla, snorri sturluson, olaf tryggvason                                                                                                                         Heimskringla, snorri sturluson, olaf tryggvason


    Tags Tags : , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :