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Heimskringla : Saga d'Hakon den Gode III
Das Fest der Wintersonne, Hagalaz Runedance
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15- Hakon répand le christianisme
Le roi Hakon était un bon chrétien lorsqu'il arriva en Norvège. Mais comme tout le pays était païen, avec de nombreux sacrifices païens, et comme il avait à se concilier nombre de personnalités éminentes, de même qu'à gagner la faveur du peuple, il résolut de pratiquer sa foi en privé. Mais il conserva les dimanches, et les jeûnes du vendredi, et quelques-uns des jours saints. Il décida par la loi que les fêtes de Jöl devraient commencer au moment où les chrétiens faisaient la fête, et que chacun, sous peine d'amende, devrait brasser de la farine de malt dans la bière, et faire durer Jöl aussi longtemps qu'il y en aurait. Avant lui, le début de Jöl, ou la nuit de l'abattage, était la nuit de milieu d'hiver (14 décembre), et Jöl était fêté pendant trois jours par la suite.
Il avait l'intention, dès qu'il se serait bien fixé dans le pays et qu'il l'aurait soumis à son pouvoir, d'y introduire le christianisme. Il y œuvra en incitant au christianisme d'abord les hommes qui lui étaient les plus chers, et beaucoup, pour lui être agréables, acceptèrent de se faire baptiser, et acceptèrent d'abandonner les sacrifices. Il habita longtemps dans le district de Throndhjem, car la force du pays y résidait, et lorsqu'il pensa que, grâce au soutien de quelques personnes influentes, il pouvait instaurer le christianisme, il envoya en Angleterre un message demandant qu'on lui envoie un évêque et des clercs pour enseigner Et lorsqu'ils arrivèrent en Norvège, Hakon fit savoir qu'il allait proclamer le christianisme dans tout le pays.
Les habitants de More et Raumsdal référèrent la question aux gens de Throndhjem. Le roi Hakon, fit alors construire plusieurs églises consacrées, et y installa des prêtres. Et lorsqu'il vint à Throndhjem, il convoqua les boendr à un Thing et les invita à accepter le christianisme. Ils donnèrent une réponse renvoyant leur décision au Thing de Frosta, qui rassemblerait des hommes de chaque district de la région de Throndhjem. Ils pourraient alors donner une réponse à cette question difficile.
16- Au sujet des sacrifices.
Sigurd, jarl de Hlader, était un des hommes les plus réputés pour les sacrifices, comme l'avait été son père Hakon avant lui. Et Sigurd présidait pour le compte du roi toutes les cérémonies de sacrifice de la région de Throndhjem. C'était une ancienne coutume, que tous les boendr se rassemblent à l'endroit du temple où allait se tenir le sacrifice, et qu'ils y amènent tout ce dont ils auraient besoin pour le temps des festivités. Les hommes amenaient de la bière pour ces fêtes. Et toutes sortes d'animaux d'élevage, ainsi que des chevaux, étaient abattus, et tout le sang qui en provenait était nommé "Hlaut ", et les récipients dans lesquels il était recueilli s'appelaient "hlautbollar". On préparait des "hlautheinar", des sortes de brosses pour asperger, avec lesquels la totalité des autels et les murs du temple, à l'intérieur et à l'extérieur, étaient éclaboussés de ce sang.
Disarblot, par August Malmström.
Mais la chair était cuite et cette viande savoureuse était partagée entre les présents. Le feu était allumé sur le sol au milieu du temple et les chaudrons pendaient au-dessus, et les gobelets pleins furent passés à travers le feu. Et celui qui avait préparé la fête, et était un chef, bénissait les gobelets pleins et toute la viande du sacrifice.
En premier était vidé le gobelet d'Odin, pour la victoire et le pouvoir du roi. Ensuite, les coupes de Njord et Freya, pour la paix et de bonnes récoltes. Puis il était coutume pour beaucoup de vider la coupe de Bragi1. Ensuite, les invités vidaient leurs gobelets à la mémoire de leurs amis défunts, et ils étaient nommés les coupes du souvenir. Sigurd le jarl était un homme aux mains ouvertes, ce qui faisait de lui un homme des plus appréciés. Il avait en effet organisé une grande fête de sacrifice à Hlader, dont il avait payé tous les frais.
Kormak Ogmundson le chanta ainsi dans sa ballade de Sigurd :
"De coupe ou d'assiette il n'est aucun besoin
Pour l'hôte qui se trouve chez le généreux,
Sigurd le généreux, dont la lignée remonte
Sans nul doute à l'antique race des géants.
Car la main de Sigurd est riche et libérale
Lui le gardien des temples, il adore les dieux,
Et sa main prodigue distribue ses richesses,
Les gains de son épée, à travers le pays."
Le jarl Sigurd
17- Le Thing de Frosta
Le roi Hakon se rendit au Thing de Frosta, pour lequel une grande foule s'était assemblée. Et lorsque le Thing siégea, le roi parla au peuple. C'était son message et sa prière, qui s'adressait aux boendr et aux tenanciers, petits et grands, et à tout le public en général, jeune ou vieux, riche ou pauvre, femmes comme hommes, qu'ils devraient tous se faire baptiser, et qu'ils devraient croire au Dieu unique et au Christ fils de Marie, et s'abstenir de tout sacrifice aux dieux païens, qu'ils devraient tenir pour saint le septième jour, et s'abstenir de tout travail ce jour-là, et jeûner ce jour-là. Dès que le roi eut proposé cela aux boendr, un murmure puis un grondement s'éleva de la foule. Ils se plaignirent que le roi voulait leur ôter leur travail et leur ancienne foi, et que la terre ne pouvait être cultivée de cette façon. Les ouvriers agricoles et les esclaves pensèrent qu'ils ne pourraient plus travailler s'ils ne mangeaient plus de viande. Et ils rappelèrent que c'était bien dans la manière du roi Hakon, et de son père, et de toute la famille, d'être plutôt généreux avec l'argent, mais regardants sur la nourriture. Asbjorn de Medalhus du Gaulardal se leva, et répondit ainsi à la proposition du roi :
" Nous, boendr, roi Hakon, lorsque nous t'avons choisi pour être notre roi et avons recouvré nos droits de l'udal au Thing de Throndhjem, pensions avoir gagné le ciel. Mais à présent, nous n'avons plus la certitude d'avoir réellement retrouvé notre liberté, et ne savons pas dans quelle mesure tu veux que nous soyons tes vassaux à nouveau, à cause de cette proposition extraordinaire. Abandonner notre ancienne foi, que nos pères et nos grands-pères ont hérité des temps les plus anciens, du temps où les morts étaient brûlés, de même que du temps où ils étaient inhumés sous des tumulus. Bien qu'ils aient été plus courageux que les hommes de notre temps, cette foi a été nôtre jusqu'à l'époque actuelle. Tu nous as aussi été tellement cher que nous t'avons laissé gouverner tout le pays, et légiférer à ta guise. Et même aujourd'hui, nous, bondis, suivons les lois que tu nous as données ici, au Thing de Frosta, et auxquelles nous avons donné notre assentiment. Et nous les suivrons encore, et tu seras notre roi tant qu'il restera un homme vivant parmi les bondis présents ici. Mais toi, roi, tu dois user de modération envers nous, et nous ordonner seulement ce à quoi nous sommes en mesure d'obéir et qui ne nous est pas impossible. Si, cependant, tu souhaitais nous imposer cela d'une haute main, et voulais éprouver ta puissance et ta force contre nous, nous sommes résolus, nous, bondis, à nous séparer de toi et à choisir pour nous-mêmes un autre chef, qui saurait se conduire avec nous de telle sorte que nous puissions librement et dans la sécurité continuer à honorer une foi qui correspond à nos propres aspirations. Maintenant, roi, tu dois choisir l'une ou l'autre de ces solutions avant la fin de ce Thing."
Asbjorn de Medalhus répond au roi Hakon. C. Krohg
Les boendr applaudirent bruyamment ce discours, et dirent qu'il exprimait leur volonté, et qu'ils se tiendraient à ce qui avait été dit ou tomberaient. Lorsque le silence revint, le jarl Sigurd dit :
"- C'est la volonté du roi Hakon de vous guider, boendr, et de ne jamais se couper de votre amitié. "
Les boendr répondirent qu'ils désiraient que le roi offre un sacrifice pour la paix et une bonne récolte, comme son père avait l'habitude de le faire. Et là-dessus, le tumulte et le bruit cessèrent, et le Thing s'acheva.
Le jarl Sigurd parla au roi par la suite, et lui conseilla de ne pas refuser en bloc ce que le peuple demandait, disant qu'il n'y avait d'autre possibilité que d'en passer par la volonté des boendr. "- Car c'est ainsi que tu l'as entendu toi-même, la volonté et le plus cher désir des chefs du peuple, et aussi de la foule. Nous devons trouver un moyen de gérer cela." Et le roi et le jarl tombèrent d'accord sur cette résolution (en 950).
18- Le roi Hakon offre un sacrifice.
A la récolte suivante, vers la saison d'hiver, une fête sacrificielle se tint à Hlader, et le roi s'y rendit. Auparavant, lorsqu'il était présent dans un endroit où se pratiquait un sacrifice, son habitude était de prendre ses repas dans une petite maison à part, seul ou avec quelques-uns de ses hommes. Mais le peuple grommelait qu'il n'était pas assis dans son haut-siège, lors de ces festivités des plus joyeuses auxquelles le peuple participait. Le jarl dit que le roi viendrait cette fois. Et le roi prit place dans son haut-siège. Alors quand le premier gobelet fut complètement rempli, le jarl Sigurd prononça quelques mots pour le bénir au nom d'Odin, et but toute la coupe au nom du roi. Le roi prit alors la corne, et fit au dessus le signe de la croix. Alors Kas de Grynling demanda :
"- Que veut dire le roi avec ce geste ? Ne sacrifiera-t-il pas ?". Le jarl Sigurd répondit :
"- Il fait tout ce que vous faites, le roi qui fait confiance à votre puissance et à votre force. Il bénit le gobelet au nom de Thor, le signant du signe du marteau avant de le boire."
Là-dessus, la soirée s'écoula paisiblement. Le lendemain, lorsque les boendr s'installèrent à table, ils pressèrent fermement le roi de manger de la viande de cheval2. Comme il ne voulut pas en entendre parler, ils insistèrent pour qu'il boive le bouillon. Et comme il refusa, ils lui demandèrent de goûter au moins la sauce. Devant son rejet, ils furent prêts à lever la main sur lui. Le jarl Sigurd vint pour rétablir la paix entre eux, en demandant au roi de poser sa bouche sur la poignée de la marmite sur laquelle la grasse fumée de la viande de cheval cuite s'était déposée. Alors le roi enveloppa l'anse d'un mouchoir de lin, puis y apposa ses lèvres, et retourna dans le haut-siège. Mais aucune des deux parties n'en fut satisfaite.
19- Fête de sacrifice à More.
L'hiver suivant, le roi fit préparer une fête de Jöl à More, et huit chefs prirent la résolution les uns avec les autres de s'y rencontrer. Quatre d'entre eux venaient de l'extérieur du district de Throndhjem, à savoir : Kar de Gryting, Asbjorn de Medalhus, Thorberg de Varnes, and Orm de Ljoxa. Et vinrent du district de Throndhjem : Botolf de Olvishaug, Narfe de Staf dans le Veradal, Thrand Hak de Egg, et Thorer Skeg de Husaby dans Eyin Idre. Ces huit hommes se lièrent entre eux, les quatre premiers pour évincer le christianisme de Norvège, les quatre autres pour obliger le roi à pratiquer un sacrifice aux dieux.
Les quatre premiers vinrent vers le sud, à More, avec quatre navires, et tuèrent trois prêtres et brûlèrent trois églises, puis s'en retournèrent. Puis, lorsque le roi et le jarl Sigurd vinrent à More avec leur cour, un grand nombre de bondis s'assemblèrent. Et ils insistèrent fermement, dès le premier jour, pour que le roi participe au sacrifice, le menaçant d'user de violence s'il refusait.
Hakon et les bondis. P.N. Arbo.
Le jarl Sigurd essaya de rétablir la paix entre eux, et insista tant que le roi consentit à prendre quelques morceaux de foie de cheval, et vida toutes les cornes que les boendr emplirent pour lui sans les signer de la croix. Mais dès que la fête fut finie, le roi et le jarl retournèrent à Hlader. Le roi était très mécontent, et se prépara à quitter Throndhjem avec tous ses hommes, disant que la prochaine fois qu'il se rendrait à Throndhjem, ce serait avec une force d'hommes en armes telle qu'il ferait payer les boendr pour leur inimitié envers lui. Le jarl Sigurd conseilla au roi de ne pas leur en tenir rigueur, ajoutant qu'il ne serait pas sage de les menacer ou de faire la guerre contre le peuple dans le pays, et en particulier dans le district de Throndhjem, où se trouvait la force du pays. Mais le roi était si furieux qu'il ne voulait écouter quiconque. Il s'en fut de Throndhjem et se rendit à More, où il resta jusqu'à la fin de l'hiver et au début du printemps (en 950). Et lorsque vint l'été, il rassembla ses hommes, et on raconte que son intention était d'attaquer le peuple de Throndhjem avec son armée.
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