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    37- D'Harald et Svein Rimhildson

     

    Dans la soirée, alors que chacun gagnait son lit, certains des hommes des navires étaient encore à leurs jeux dans la campagne. Harald était avec ceux qui s'exerçaient à terre, et il dit à son valet de se rendre au navire, de préparer sa couche et de l'attendre là-bas. Le garçon fit ce qui lui avait été demandé. Le roi était allé dormir. Et comme le gamin trouvait qu'Harald tardait, il s'installa dans son lit. Svein Rimhildson dit : "- C'est une honte pour des hommes braves que d'être partis de leur maison, de leur ferme, et d'avoir des serviteurs pour dormir à côté d'eux. » Le garçon dit qu'Harald lui avait ordonné de venir ici. Svein Rimhildson dit : « - Nous nous soucierions peu qu'Harald dorme ici, s'il n'y amenait des esclaves et des mendiants." Et il saisit une cravache, et en frappa le garçon à la tête jusqu'à ce que le sang coule. Le valet s'enfuit rapidement vers la campagne, et dit à Harald ce qui s'était passé, lequel se rendit immédiatement au navire, vers la partie arrière du gaillard d'avant, et frappa Svein d'un coup de grande hache, lui infligeant une blessure sévère aux mains. Puis Harald retourna sur la grève. Svein lui courut après à terre, et, appelant ses amis, s'empara de lui, projetant de le pendre incontinent. Mais pendant qu'ils s'y affairaient, Sigurd Sigurdson gagna le navire du roi et le réveilla. Lorsque le roi ouvrit les yeux et reconnut Sigurd, il dit : « - Tu devras mourir à cause de cela, car tu t'es imposé en ma présence, alors que tu savais très bien que je te l'ai interdit. », et sur ces mots, le roi bondit sur ses pieds.

    Sigurd répliqua : « - C'est en votre pouvoir quand vous le voudrez. Mais il y a plus urgent. Allez sur terre aussi vite que vous le pourrez pour aider votre frère, car le peuple du Rogaland est sur le point de le pendre. »

    Alors le roi dit : « - Dieu nous aide, Sigurd ! Appelle mon sonneur de trompe, et dis-lui d'amener tout le monde à terre, et de me rejoindre. »

    Le roi sauta à terre, Et tous ceux qui le connaissaient le suivirent jusqu'à l'endroit où le gibet avait été érigé. Le roi prit tout de suite Harald avec lui, et tous ceux qui avaient entendu la corne, équipés de leurs armures, rejoignirent le roi. Alors le roi ordonna que Svein et ses compagnons quittassent le pays en tant qu'hors-la-loi. Mais, sur le conseil d'hommes de bien, le roi consentit à les laisser disposer de leurs propriétés, mais déclara que nul dédommagement ne serait versé pour la blessure de Svein.

    Alors Sigurd Sigurdson demanda au roi s'il souhaitait qu'il quitte aussi le pays.

    « - Je ne le veux pas, dit le roi, car je ne peux vraiment être nulle part sans toi ! »

     

    38- D'un miracle du roi Olaf.

     

    Il y avait un homme jeune et pauvre, nommé Kolbein. Et Thora, la mère du roi Sigurd le Croisé, avait ordonné qu'on lui coupât la langue, et pour rien d'autre que le fait que ce jeune homme avait pris une pièce de viande dans la casserole de la mère du roi, disant que le cuisinier la lui avait donnée puisqu'il n'avait pas encore osé la lui servir. L'homme était longtemps resté sans pouvoir parler. Ainsi le dit Einar Skulason dans la ballade d'Olaf :

    « L'orgueilleuse dame riche, pour pas grand-chose,

    Fit couper la langue du garçon de sa bouche :

    L'homme sans défense, privé de la parole

    Survécut avec peine à la blessure affreuse.

    Quelques semaines plus tard il fut vu à Hild,

    Comme depuis toujours il s'y était rendu,

    Pour que, pauvre garçon, sa parole revienne

    Par le pouvoir d'Olaf, lui qui le vénérait. »

    Après quoi, le jeune homme vint à Nidaros et entra dans l'église du Christ. Mais à la deuxième messe d'Olaf, avant matines, il tomba endormi, et crut voir le roi Saint-Olaf venir à lui ; et qu'Olaf lui parlait, et qu'il tenait dans ses mains le moignon de sa langue, qu'il étira. Et lorsqu'il se, réveilla, il se retrouva intact, et remercia joyeusement notre Seigneur et le saint roi Olaf, qui l'avaient pris en pitié et l'avaient aidé. Car il était venu ici muet, s'était rendu auprès du sanctuaire, et s'en allait guéri, doté d'une parole claire et distincte.

     

    39- Le miracle du roi Olaf pour un prisonnier

     

    Les païens firent prisonnier un jeune homme de famille danoise et l'emmenèrent au Vindland, où il fut mis dans les fers avec d'autres captifs. Dans la journée, il était seul dans les chaînes, sans aucun garde. Mais la nuit, un fils de paysan était à côté de lui dans les entraves, afin qu'il ne puisse s'en échapper. En butte à la peine et à la vexation, ce pauvre homme ne pouvait trouver le sommeil, et réfléchissait à ce qui pourrait lui venir en aide, car il avait grande frayeur de l'esclavage, et se languissait de faim et de torture. Il ne pouvait guère espérer être racheté par ses amis, car ils avaient déjà versé pour lui rançon deux fois sur leur propre argent pour le ramener des terres païennes. Et il savait bien qu'il leur serait difficile et trop onéreux de subvenir une troisième fois à ce fardeau.

    Ce qui est bien avec l'homme qui ne veut pas endurer plus de ce monde, c'est que cet homme savait ce qu'il avait déjà souffert. Il ne vit qu'un moyen, et c'était de se libérer et de s'échapper s'il pouvait. Il résolut pendant la nuit de tuer le paysan et de couper son pied après l'avoir tué, et de s'enfuir dans la forêt avec la chaîne autour de sa jambe. Lorsque les autres s'en rendirent compte, peu après le lever du soleil, ils le poursuivirent avec des chiens habitués à traquer quiconque s'enfuyait, bien décidés à le retrouver, quel que soit le soin avec lequel il se cachait. Ils remirent la main sur lui et le battirent, et le supplicièrent de bien des façons, puis le traînèrent au camp, le laissant à peine vivant et ne lui montrant nulle miséricorde. Ils le torturèrent gravement, le laissèrent dans une pièce obscure, dans laquelle se trouvaient déjà seize autres chrétiens, et le lièrent dans les fers et d'autres sortes de liens, aussi serrés que possible. Alors il se mit à penser que la misère et les maux dont il avait souffert précédemment n'étaient que des ombres par rapport à ses souffrances présentes. Il ne voyait personne dans cette prison qui puisse solliciter miséricorde pour lui. Personne ne montrait de compassion pour sa misère, à part les chrétiens qui étaient liés à lui, qui se lamentèrent avec lui et déplorèrent son destin en même temps que leurs propres malheurs et impuissance. Un jour, il lui conseillèrent de faire un vœu au roi Saint-Olaf, de se vouer à quelque office dans sa demeure sacrée, s'il pouvait, par la grâce de Dieu et les prières à Saint-Olaf s'échapper de cette prison. Il accepta joyeusement, fit son vœu, et se prépara à la possibilité qu'ils avaient mentionnée. La nuit suivante, il pensa voir en son sommeil un homme, pas très grand, se tenant à son côté, et qui lui parla ainsi : « - Ici, toi, malheureux, pourquoi ne te lèves-tu pas ? »

    Il répondit : « - Messire, qui êtes-vous ? »

    « - Je suis le roi Olaf, celui que tu as appelé. »

    « - Oh, mon bon seigneur, ce serait avec joie que je me lèverais, mais je me trouve lié avec du fer et des chaînes, ainsi que les autres hommes qui se trouvent ici. »

    Après quoi le roi l'aborda avec ces mots : « - Lève-toi à présent, et ne sois pas effrayé, car tu es libre. »

     

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    L'apparition de Saint-Olaf. G. Munthe.

     

    Il s'éveilla immédiatement, et raconta à ses compagnons ce qui lui était apparu en rêve. Ils lui dirent de se lever, et de vérifier que c'était vrai. Il se leva, et constata qu'il était libre. Mais, lui dirent ses compagnons, ça l'aiderait, mais peu, car la porte était verrouillée de l'intérieur et de l'extérieur. Alors un vieil homme qui était assis là, dans un état déplorable, prit la parole et lui dit de ne pas douter de la miséricorde de l'homme qui l'avait libéré de ses chaînes. "- Car il a accompli ce miracle pour toi afin que tu puisses bénéficier de sa merci, et après quoi être libre, sans plus souffrir misère et torture. Hâte-toi, maintenant, et cherche la porte, et si tu es capable de sortir, tu es sauvé."

    Il fit ainsi, trouva la porte ouverte, se glissa dehors et s'enfuit vers la forêt. Dès que les hommes du Vinland s'en aperçurent, ils libérèrent les chiens, et le poursuivirent en grande hâte. Et le pauvre homme resta caché, et vit bien qu'ils le pourchassaient. Mais les mâtins perdirent la trace en s'approchant de lui, et tous les yeux qui se posaient sur lui semblaient frappés de cécité, de sorte que personne ne put le trouver, bien qu'il se trouve sous leur nez, et ils s'en retournèrent chez eux, vexés de n'avoir pu le débusquer. Le roi Olaf ne permit pas que cet homme fût tué, une fois qu'il eut atteint la forêt, et lui rendit la santé et l'ouïe ; car ils l'avaient tant torturé et battu qu'il en était devenu sourd. A la fin, il arriva à bord d'un navire, avec deux autres chrétiens qui avaient été longtemps affligés dans ce pays. Et tous travaillèrent avec zèle sur le navire, et réussirent ainsi à s'échapper. Puis il se rendit à la maison du saint homme, fort et apte à porter les armes. Maintenant, il était ennuyé de son vœu, s'écarta de sa promesse au saint roi, et un jour s'enfuit. Il arriva chez un bondi qui l'hébergea pour l'amour de Dieu. Alors, durant la nuit, il vit trois filles venir à lui, belles et bien vêtues. Elles s'adressèrent directement à lui, et le réprimandèrent sévèrement pour s'être montré si grossier en fuyant le bon roi qui lui avait témoigné tant de compassion, tout d'abord en le libérant de ses fers, puis de sa prison. Et pourtant, il avait déserté le doux maître au service duquel il était entré. Il s'éveilla alors, empli de terreur, et raconta son rêve au maître de maison. Le bonhomme n'eut rien de plus cher au monde que de le renvoyer à la sainte place. Ce récit a été écrit par un homme qui a rencontré cet homme, et vu les marques des fers sur son corps.

     

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    40- Le roi Sigurd épouse Cécilia

     

    Dans la dernière période de la vie du roi Sigurd, le bruit courut de sa nouvelle et extraordinaire résolution de divorcer de sa reine et de prendre Cécilia, fille d'un grand homme, pour épouse. Il ordonna en conséquence que soit préparée une grande fête, et eut l'intention de célébrer son mariage avec elle à Bergen.

    Mais lorsque l'évêque Magnus entendit cette nouvelle, il en fut désolé. Et un jour, lui qui était également évêque de Bergen, se rendit à la halle du roi, avec un prêtre nommé Sigurd. En arrivant à la demeure du roi, Magnus lui fit envoyer un message l'informant qu'il souhaitait le rencontrer, et priant le roi de sortir le voir. Il vint, et se présenta avec une épée dégainée dans la main. Il reçut l'évêque aimablement, et le pria d'entrer et de s'asseoir à table avec lui.

    L'évêque répondit : « - J'ai en réalité une toute autre affaire à traiter. Est-il vrai, sire, que vous avez l'intention de vous remarier et d'éconduire votre reine pour prendre une autre épouse ? »

    Le roi dit que cela était exact.

    Alors l'évêque perdit contenance, et répondit avec colère : « - Comment peut-il vous venir à l'esprit, sire, de commettre dans notre évêché un acte tel que trahir la parole et la loi de Dieu, et la sainte Eglise ? Je suis très surpris que vous traitiez avec tant de mépris notre office épiscopal et votre propre dignité royale. Je vais à présent faire mon devoir, et au nom de Dieu, de Saint-Olaf et de Pierre l'Apôtre, et des autres saints, vous interdire cette vilénie. »

    Tandis qu'il parlait ainsi, il se tenait debout, tout droit, comme s'il étirait son cou pour un coup, au cas où le roi déciderait de laisser partir son épée. Et le prêtre Sigurd, qui fut évêque plus tard, déclara que le ciel ne lui apparut alors pas plus grand qu'une peau de veau, tant était effrayante l'apparence qu'avait le roi Sigurd. Cependant, le roi retourna à la halle, sans dire mot. Et l'évêque retourna chez lui, si gai et si joyeux qu'il salua tous les enfants sur le chemin et joua avec ses doigts.

    Alors le prêtre Sigurd lui en demanda la raison, disant : « - Pourquoi êtes-vous si joyeux, monsieur ? Ne prenez-vous pas en compte que le roi doit-être furieux contre vous ? Et ne serait-il pas préférable de lui laisser la voie libre ? »

    L'évêque répondit : « - Il me semble préférable qu'il n'agisse pas ainsi. Et quoi d'autre que la mort pourrait être meilleur, ou plus désirable, que de perdre la vie pour l'honneur de Dieu ? Ou de mourir pour la sainte cause de la chrétienté et de notre propre sacerdoce, en les protégeant de ce qui n'est pas droit ? Je suis si joyeux parce que j'ai accompli ce que je devais. »

    Il y eut beaucoup de bruit en ville à cause de cela. Le roi se prépara pour un voyage, et emmena avec lui du blé, du malt et du miel. Il partit vers le sud à Stavanger, et prépara là-bas une fête pour son mariage avec Cécilia. Quand l'évêque qui y officiait en entendit parler, il se rendit auprès du roi et lui demanda s'il était vrai qu'il envisageait de se marier alors que la reine était toujours vivante.

    Le roi lui dit que c'était vrai.

    L'évêque répondit : « - S'il doit en être ainsi, sire, vous devez savoir combien ces choses sont interdites aux personnes de rang inférieur. Cependant, il vous semble qu'elles vous sont autorisées, puisque vous détenez un grand pouvoir qui vous est propre, bien que ce soit contre le droit et les convenances. Mais je ne vois pas comment vous pourriez faire cela dans notre évêché, en déshonorant à la fois les commandements de Dieu, la sainte Eglise et notre autorité épiscopale. Mais vous devrez donner une grande quantité de cadeaux et de biens pour y parvenir, et payer ainsi le dédommagement dû à Dieu et à notre office pour une telle transgression.»

    Alors le roi dit : « - Prenez ce que vous voulez parmi nos possessions. Vous êtes bien plus raisonnable que l'évêque Magnus. »

    Alors le roi partit, aussi content de cet évêque qu'il avait été furieux contre celui qui s'était opposé à lui. Après quoi, le roi épousa la fille, qu'il aima tendrement.

     

    41- Amélioration de Konungahella

     

    Le roi Sigurd améliora tant la ville de Konungahella qu'il n'y avait pas de plus grande cité en Norvège à l'époque, et il y résida longtemps pour la défense des frontières. Il construisit une maison royale dans le château, et imposa la corvée dans tous les districts voisins de la ville, de même qu'aux habitants de la cité, de sorte que chaque personne âgée de plus de neuf ans devait fournir au château cinq armes de jet, ou autant de grands pieux pointus à leur extrémité et de cinq aunes de long. Dans le château, le roi bâtit une église en croix en poutres, pour ce qui concerne le bois, et en d'autres matériaux. Cette église en croix fut consacrée dans la vingt-quatrième année du règne du roi Sigurd. Le roi y laissa la relique de la Sainte-Croix, et bien d'autres reliques sacrées. Elle fut nommée Eglise du château. Et devant le grand autel, il fit placer des tables qu'il avait fait fabriquer en Grèce, et qui étaient de cuivre et d'argent, toutes dorées, et bellement décorées de joyaux. Là se trouvait également le reliquaire que le roi des Danois Eirik Eimune avait fait parvenir au roi Sigurd. Et le livre d'autel, écrit en lettres d'or, que le patriarche avait offert au roi Sigurd.

     

    42- La mort du roi Sigurd.

     

    Trois ans après la consécration de l'église en croix, alors que le roi Sigurd faisait halte à Viken, il tomba malade (1130). Il mourut la veille de la messe de Sainte-Marie (15 août), et fut inhumé dans l'église de Halvard, dans le mur sans chœur du côté sud. Son fils Magnus était en ville à ce moment-là, et prit possession de tous les trésors royaux lorsque le roi Sigurd mourut. Sigurd avait été roi de Norvège vingt-sept ans (1104-1130) et était âgé de quarante ans lorsqu'il mourut. Le temps de son règne fut prospère pour le pays, car il resta en paix, et les récoltes furent bonnes.

     

    Fin de la Saga de Sigurd Jorsalfar

     

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  • Heimskringla, snorri sturluson, magnus l'aveugle, harald gille

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    1- Magnus et Harald proclamés rois

    Magnus, fils du roi Sigurd, fut proclamé à Oslo roi de tout le pays immédiatement après le décès de son père, en vertu du serment que l'ensemble du peuple avait prêté au roi Sigurd. Et nombreux furent ceux qui entrèrent à son service, et nombreux ceux qui devinrent ses barons. Magnus était alors le plus bel homme de Norvège, d'un tempérament passionné, mais cruel, et fort habile dans les disciplines physique. Il obtint la faveur du peuple surtout par le respect dû à son père. Il était grand buveur, avide d'argent, dur et obstiné.

    Harald Gille, d'autre part, était très plaisant dans ses relations, gai, et plein de joie. Et si généreux qu'il n'épargnait rien pour le bien de ses amis. Il écoutait volontiers les bons conseils, de sorte qu'il permettait de bonne grâce aux autres de le consulter et de lui donner leur avis. Il en obtint faveur et bonne réputation, et beaucoup d'hommes s'attachèrent d'eux-mêmes à lui plus qu'au roi Magnus.

    Harald se trouvait à Tunsberg lorsqu'il appris la nouvelle de la mort de son frère le roi Sigurd. Il rassembla ses amis lors d'une réunion, et il fut résolu de tenir un Thing de Hauga1, ici, dans cette ville. A ce Thing, Harald fut choisi comme roi de la moitié du pays, et le serment qui avait été obtenu de lui de renoncer à son héritage paternel fut qualifié de forcé. Alors Harald constitua une cour, et désigna des barons. Et très tôt, il eut autant de monde autour de lui qu'autour du roi Magnus. Alors des hommes allèrent et vinrent entre les deux, et les choses restèrent en l'état pendant sept jours. Mais le roi Magnus, trouvant qu'il n'avait pas assez de forces, fut obligé de céder, et de partager le royaume en deux avec Harald. Le pays fut ainsi divisé (3 octobre 1130) de façon à ce que chacun puisse disposer de la moitié du royaume du roi Sigurd, mais que seul le roi Magnus hérite de la flotte des navires, du service de la table, des biens de valeur et des biens mobiliers qui avaient appartenu à son père, le roi Sigurd. Il était cependant le moins satisfait de ce partage. Bien qu'ils fussent dans des dispositions différentes, ils régnèrent ainsi en paix sur le pays pendant quelque temps. Le roi Harald eut un fils nommé Sigurd, de Thora, une fille de Guthorm Grabarde. Après quoi le roi Harald épousa Ingerid, une fille de Ragnvald, qui était un fils du roi de Suède Inge Steinkelson. Le roi Magnus était marié à une fille de Knut Lavard, une sœur du roi de Danemark Valdernar. Mais le roi Magnus, n'éprouvant aucune affection pour elle, la renvoya en Danemark. Et de ce jour, tout tourna mal pour lui, et il attira sur lui l'inimitié de sa famille.

     

    2- Des forces d'Harald et de Magnus

    Lorsque les deux parents, Harald et Magnus, eurent été trois ans rois de Norvège (1131-1133), ils passèrent tous deux le quatrième hiver dans la ville de Nidaros (1134), et s'invitèrent réciproquement en tant qu'hôtes. Mais leurs gens étaient tous déjà prêts au combat. Au printemps, le roi Magnus fit voile vers le sud le long des terres avec sa flotte, et attira à lui tous les hommes qu'il put obtenir dans chaque district, et s'enquit auprès de ses amis s'ils étaient prêts à le renforcer de leur puissance pour reprendre la dignité royale au roi Harald, et lui donner une partie de la propriété du royaume, de manière appropriée. Il leur représenta que le roi Harald avait déjà renoncé par serment au royaume. Le roi Magnus obtint le consentement de nombreux hommes puissants. Ce même printemps, Harald se rendit dans les Uplands, et par les hautes routes, vers l'est et Viken. Et lorsqu'il eut vent de ce que le roi Magnus faisait, il rassembla également des hommes à ses côtés.

    Partout où les deux parties allaient, ils tuaient le bétail, ou même les gens, sur les fermes de la partie adverse. Le roi Magnus avait de loin le plus de monde, car la plus grande partie de la force du pays lui était ouverte pour qu'il puisse y puiser des hommes. Le roi Harald se trouvait en Viken, sur le bord oriental du fjord, et y rassemblait des hommes, tandis qu'ils se faisaient l'un à l'autre des dommages en biens et en vies. Le roi Harald avait avec lui Kristod, son frère du côté de sa mère, et bien d'autres barons. Mais le roi Magnus en avait plus encore. Le roi Harald se trouvait avec ses forces en un lieu nommé Fors, en Ranrike, et en partit en direction de la mer. Le soir précédant la St Laurent (10 août), ils soupèrent à un endroit appelé Fyrileiv, tandis que les gardes effectuaient leur ronde à cheval autour de la maison.

     

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     Les sentinelles montaient la garde à cheval.

     

    Les sentinelles observèrent que l'armée du roi Magnus se hâtait en direction de la maison, et qu'elle consistait en plus de six mille hommes, tandis que le roi Harald en avait autour de mille cinq cents. Alors les gardes vinrent, qui avaient à apporter la nouvelle de ce qui se passait au roi Harald, et lui dirent que l'armée du roi Magnus était maintenant très proche de la ville.

    Le roi dit : "- Qu'a donc mon parent le roi Magnus Sigurdson ? Il ne veut certainement pas nous combattre. "

    Thjostolf Alason répondit : " - Vous devriez certainement, Sire, vous y préparer, ainsi que vos hommes. Le roi Magnus a réuni une telle armée pendant l'été afin de vous livrer bataille lorsqu'il vous rencontrerait. "

    Alors le roi Harald se leva, et ordonna à ses hommes de prendre leurs armes. "- Nous combattrons, si notre parent, le roi Magnus, veut nous livrer bataille."

    Puis les trompes de guerre retentirent, et tous les hommes d'Harald sortirent des bâtiments vers un champ clos, et hissèrent leurs bannières. Le roi Harald portait deux chemises de maille, mais son frère Kristrod n'avait pas d'armure ; il était un homme brave. Lorsque le roi Magnus et ses hommes virent les troupes du roi Harald, ils préparèrent leurs lignes et en firent l'arrangement de sorte qu'elles pouvaient entourer complètement l'ensemble des troupes du roi Harald.

    Ainsi chanta Haldor Skvaldre :

    "Le roi Magnus sur le champ de bataille

    Gagna vraiment à étirer ses rangs.

    La plaine fut inondée de sang chaud,

    En un long flot écarlate et fumant."

     

    3- La bataille de Fyrileiv

    Le roi Magnus faisait porter la Sainte Croix devant lui pour la bataille, et le combat fut impressionnant et fort rude. Le frère du roi, Kristrod, avait pénétré avec ses troupes jusqu'au milieu des lignes de Magnus, et fauché tout autour de lui, de sorte que les gens lui laissaient le champ libre où qu'il allât. Mais un puissant bondi qui était dans les rangs du roi Harald leva sa lance des deux mains, et la planta entre les épaules de Kristrod, jusqu'à la poitrine. Et ainsi tomba Kristrod. Nombre de ceux qui étaient auprès du bondi lui demandèrent la raison d'un acte aussi dément.

    Le bondi répondit : "- Il sait maintenant ce qu'il en coûte d'abattre mes bêtes en été, et de me prendre tout ce que j'ai dans ma maison, et de me forcer à le suivre jusqu'ici. J'avais résolu de lui en donner remboursement dès que l'occasion s'en présenterait."

    Après quoi l'armée d'Harald prit la fuite, et il s'enfuit lui-même avec tous ses hommes. Nombreux furent ceux qui tombèrent. Et Ingemar Sveinson d'Ask, un grand chef et lenderman, reçut là sa blessure mortelle, ainsi que presque soixante des barons du roi Harald, qui moururent. Harald s'enfuit vers l'est en Viken vers ses bateaux, et quitta le pays pour rejoindre le roi Eirik Eimune au Danemark, le trouva en Seeland, et le supplia de lui accorder son aide. Le roi Eirik le reçut bien, et en premier lieu parce qu'ils s'étaient engagés l'un envers l'autre par serment à être comme des frères2.

    Il lui donna Halland comme fief à gouverner, ainsi que sept langskips, mais non équipés. Après quoi, le roi Harald partit vers le nord à travers le Halland, et de nombreux norvégiens vinrent le rejoindre.

    Après cette bataille, le roi Magnus soumit tout le pays, accordant vie et sécurité à tous les blessés, et prenant garde de les traiter à l'égal de ses propres hommes. Il déclara le royaume sien, et eut le choix des meilleurs hommes du pays. Après quoi, lorsqu'ils tinrent conseil entre eux, Sigurd Sigurdson, Thorer Ingeridson et tous les hommes les plus avisés lui conseillèrent de garder leurs forces à Viken, et d'y rester, au cas où Harald reviendrait du sud. Mais le roi Magnus voulait suivre sa propre idée, et partit vers Bergen, dans le nord. Il y resta tout l'hiver (1135), et laissa ses hommes le quitter. Et ses lendermen retournèrent dans leurs propres demeures.

     

    4- La mort d'Asbjorn et de Nereid

    Le roi Harald vint à Konungahella avec les hommes qui l'avaient suivi depuis le Danemark. Les lendermen et les bourgeois de la ville rassemblèrent une force contre lui, qu'ils déployèrent en larges rangs sur la ville. Le roi Harald aborda avec ses navires, et envoya un message aux bondis, leur demandant de ne pas lui refuser cette terre, car il ne revendiquait rien d'autre que ce qui lui revenait de droit. Alors les médiateurs allèrent et vinrent entre eux. Et il en résulta que les bondis résolurent de dissoudre leurs troupes, et lui firent soumission. Là-dessus, il accorda des fiefs et des propriétés aux lendermen, de façon à ce qu'ils puissent le soutenir, et régla aux bondis qui le rejoignirent le juste dédommagement pour ce qu'ils avaient perdu. En conséquence, beaucoup d'hommes s'attachèrent d'eux-mêmes au roi Harald. Et il progressa vers l'est et Viken, où il laissa les gens en paix, à part les hommes de Magnus qu'il pilla et tua où qu'il les trouvât. Et en arrivant vers Sarpsborg, il captura deux des lendermen de Magnus, Asbjorn et son frère Nereid. Il leur donna le choix : l'un devait être pendu, et l'autre jeté dans les chutes d'eau du Sarpsborg, et ils devaient choisir à leur gré. Asbjorn choisit d'être précipité dans les cataractes, parce qu'il était l'aîné des deux, et que cette mort apparaissait comme la plus terrifiante. Et il en fut ainsi.

    Haldor Skvaldre en parla de cette manière :

    "Asbjorn, qui s'était opposé au roi,

    Fut jeté dans la cascade sauvage.

    Nereid, qui s'était opposé au roi,

    Dut danser sur le grand arbre d'Hagbard.

    Le roi donna de diverses façons

    Leur pitance aux bêtes et oiseaux de proie :

    Les hommes généreux osant lui résister

    Furent traités comme ses pires ennemis."

    Après quoi, le roi Harald partit vers Tunsberg dans le nord, où il fut bien reçu, et une grande force le rejoignit.

     

    1  Un Thing de Hauga est un Thing se tenant auprès de tumuli ou de collines funéraires.

    2  Ce serment de fraternité par lequel on s'engageait à aider ou à venger l'autre était répandu un peu partout au moyen âge. On en a gardé l'expression de "frères jurés."

    Illustrations : G. Munthe
    Encadrement : Bouloute créations

     

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    5- Ce que les conseils proposèrent.

     

    Lorsque le roi Magnus, qui se trouvait à Bergen, entendit ces nouvelles, il rassembla tous les chefs qui se trouvaient dans la ville, et leur demanda conseil, et ce qu'ils devaient faire à présent. Alors Sigurd Sigurdson dit : "- Ici, je peux donner un bon conseil. Equipez un navire d'un bon équipage, et laissez-moi, ou tout autre baron, le commander. Envoyez-le ensuite à votre parent, le roi Harald, et offrez-lui la paix à des conditions qui restent à déterminer, offrez-lui la moitié du royaume. Il me semble probable qu'Harald, par ces mots et sur l'avis d'hommes de bonne volonté, accepterait cette proposition, et qu'ainsi la paix pourrait s'établir entre vous.

    Le roi Magnus répliqua : "- Je n'accepte pas cette proposition. Car quel avantage y aurait-il, après avoir gagné le royaume tout entier cet été, d'en abandonner la moitié maintenant ? Donnez-nous quelque autre conseil. "

    Alors Sigurd Sigurdson répondit : "- Il apparaît, sire, que les lendermen qui en automne demandèrent votre consentement pour retourner chez eux se tiennent à présent dans leurs demeures, et qu'ils ne viendront pas à vous. A cette époque, ce fut surtout contre mon avis que vous avez totalement dispersé les gens que nous avions rassemblés. Car j'avais bien supposé qu'Harald pourrait revenir à Viken dès qu'il saurait qu'il n'y avait plus de chefs là-bas. J'ai maintenant un autre conseil, mais il est bien pauvre. Il pourrait pourtant nous être utile. Envoyez vos suivants, et d'autres hommes avec eux, et faites leur attaquer ceux qui ne voudront pas se joindre à nous en cette nécessité, dites leur de les tuer. Et distribuez leurs propriétés à ceux qui voudront bien vous aider, même s'ils étaient de peu d'importance auparavant. Laissez-les conduire le peuple eux-mêmes, les mauvais comme les bons. Et marchez avec ceux que vous aurez ainsi réunis contre le roi Harald, puis livrez-lui bataille."

    Le roi rétorqua : "- Il serait impopulaire de mettre à mort des personnes de distinction, et d'élever des gens inférieurs qui souvent trahissent parole et loi, conduisant le pays à être pire encore. Je voudrais entendre quelque autre conseil. "

    Sigurd répondit : "- Il devient difficile pour moi de donner encore des conseils, puisque vous ne voudrez jamais ni faire la paix, ni livrer bataille. Rendons-nous vers le nord à Throndhjem, où la majeure partie de la force du pays est plutôt de notre bord ; et sur la route, réunissons tous les hommes que nous pourrons. Il se pourrait que ces Elfgrims se fatiguent de nous courir après."

    Le roi rétorqua : "- Nous ne devons pas fuir devant ceux que nous avons défaits cet été. Donnez encore quelque meilleur conseil."

    Alors Sigurd se leva et dit, tandis qu'il se préparait à se retirer : "- Je vais maintenant vous donner le conseil dont je vois que vous l'attendez, et qui sera sans nul doute suivi. Restez assis ici à Bergen jusqu'à ce qu'Harald arrive avec ses troupes, ainsi vous souffrirez à la fois mort et déshonneur."

     

    Heimskringla, snorri sturluson, magnus l'aveugle, harald gille

     Les conseils de Sigurd Sigurdson

     

    Et Sigurd ne resta pas plus longtemps à cette réunion.

     

    6- Des forces d'Harald

     

    Le roi Harald vint de l'est le long de la côte avec une grande armée, et cet hiver-là (1135) fut nommé de ce fait l'Hiver de la Foule. Le roi Harald arriva à Bergen le soir de Noël, et atterrit avec sa flotte à Floruvagar. Mais il ne voulut point combattre pendant le temps sacré. Alors le roi Magnus prépara ses défenses dans la ville. Il construisit un trébuchet sur l'île, et plaça des chaînes de fer et des bastaings de bois dans le passage entre la maison royale et Nordnes, et vers le pont des moines. Il fit faire des chausses-trappes et les fit jeter dans le champ de St Jean, et n'interrompit ces travaux que pour les trois jours saints de Noël. Le dernier jour sacré de Yule, le roi Harald ordonna à ses trompes de guerre de sonner le rassemblement des hommes afin de rallier la ville. Et, pendant les jours de Noël, son armée s'était accrue de neuf cents hommes.

     

    7- Le roi Magnus fait prisonnier

     

    Le roi Harald fit une promesse au roi Saint-Olaf pour la victoire, qu'il construirait une église de St Olaf dans la ville à ses propres frais. Le roi Magnus rassembla ses hommes sur le parvis de l'église du Christ. Mais le roi Harald laissa ses vaisseaux d'abord à Nordnes. Lorsque le roi Magnus et ses troupes s'en aperçurent, ils firent un détour vers la ville et vers la limite du rivage. Mais, tandis qu'ils passaient dans les rues, beaucoup des bourgeois coururent vers leurs maisons et demeures, et beaucoup de ceux qui traversaient les champs se prirent dans les chausse-trappes. Alors le roi Magnus et ses hommes se rendirent compte que le roi Harald et toutes ses forces avaient ramé vers Hegravik, et avaient atterri là-bas, et qu'ils avaient de là pris position sur la colline face à la ville. Alors le roi Magnus retourna dans les rues, et ses hommes s'enfuirent dans toutes les directions, certains vers les montagnes, certains vers le voisinage du couvent des nonnes, d'autres vers les églises, ou cherchèrent à se cacher de leur mieux. Le roi Magnus prit la fuite vers ses navires. Mais il n'y avait aucune possibilité de s'en aller, car les chaînes de fer empêchaient le passage des bateaux. Il n'avait plus alors que peu d'hommes avec lui, et ne put rien faire.

    Einar Skulasson le raconte dans la chanson d'Harald :

    "Une pleine semaine une chaîne de fer

    Entrava la navigation vers l'océan :

    L'écurie bleue de Bergen fut vite fermée,

    Ses chariots flottants ne purent plus passer."

    Peu après, les gens de Harald arrivèrent aux navires, et le roi Magnus fut capturé. Il était assis devant, sur le gaillard d'avant entre les coffres du haut-siège, avec à ses côtés Hakon Fauk, le frère de sa mère, qui était très populaire mais n'avait jamais été considéré comme sage, et Ivar Assurson. Ceux-ci, et bien d'autres amis du roi Magnus, furent pris, et pour certains, tués sur le champ.

     

    8- La mutilation du roi Magnus

    Après quoi le roi Harald eut une réunion avec ses proches et leur demanda conseil. Et lors de cette réunion, le jugement fut prononcé que le roi Magnus devait être déposé, dépossédé de ses domaines, et ne devait pas plus longtemps porter le titre de roi. Il fut alors livré aux esclaves du roi, qui le mutilèrent, l'énucléant des deux yeux, lui coupant un pied, et le châtrant pour finir.

     

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    Le supplice du roi Magnus

     

    Ivar Assurson fut aveuglé, et Hakon Fauk exécuté. Tout le pays fut alors réduit à l'obéissance au roi Harald. Par la suite, on examina avec diligence qui avaient été les meilleurs amis du roi Magnus, et qui connaissait le mieux les cachettes de son argent et autres biens de valeur. Le roi Magnus avait toujours gardé par devers lui la Sainte Croix qu'il portait lors de la bataille de Fyrileiv, mais ne voulut pas dire où elle avait été déposée pour sa protection. L'évêque Reinald de Stavanger, qui était anglais, était considéré comme un homme très cupide et avare, et on pensa en conséquence que beaucoup d'argent et de trésors avaient été confiés à sa garde. Des hommes furent donc envoyés le quérir, et il vint à Bergen, où il lui fut demandé avec insistance quelle était sa connaissance d'un tel trésor. Il nia tout en bloc, ne voulant rien admettre, et offrit de prouver son innocence par ordalie. Mais le roi Harald refusa, mettant l'évêque à l'amende pour la somme de quinze marks d'or, qu'il devrait verser au roi. L'évêque déclara qu'il ne saurait ainsi appauvrir son évêché, et qu'il préférait offrir sa vie. Alors ils pendirent l'évêque sur l'île, près de la machine de guerre. Alors qu'il se dirigeait ver le gibet, il arracha sa chaussette de son pied, et dit comme un serment : "- Je n'en sais pas plus au sujet du trésor du roi Magnus que ce qu'il y a dans cette chaussette." Et dedans se trouvait un anneau d'or. L'Evêque Reinald fut inhumé à Nordness dans l'église de Michel, ce qui fut grandement blâmé.

     

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    La pendaison de l'évêque Reinald

     

    Après ces événements, Harald Gille resta seul roi de Norvège tant qu'il vécut.

     

    9- Extraordinaires présages à Konungahella

    Cinq ans après la mort du roi Sigurd, des événements étonnants eurent lieu à Konungahella (1135). Guthorm, un fils d'Harald Fletter, et Saemund Husfreyja, étaient à cette époque officiers du roi dans cette ville. Saemund était marié à Ingebjorg, une fille du prêtre Andres Brunson. Leurs fils étaient Paul Flip et Gunne Fis. Le fils naturel de Saemund se nommait Asmund. Andres Brunson était un homme très remarquable, qui rendait l'office divin dans l'église de la Croix. Son épouse s'appelait Solveig1. Jon Loptson, âgé de onze ans, vivait dans leur maison comme fils adoptif pour y être éduqué. Le prêtre Lopt Saemundson, père de Jon, était également en ville à cette époque. Le prêtre Andres et solveig avaient également une fille, Helga, qui était l'épouse d'Einar. Il arriva alors à Konungahella, la nuit du dernier dimanche après la semaine de Pâques, qu'un grand bruit se produisit dans les rues de toutes la cité, comme si le roi y passait avec toute sa cour. Les chiens en furent si affectés que nul ne put les tenir, et qu'ils se libérèrent. Et en arrivant dehors, ils devinrent fous, mordant tout ce qui se trouvait sur leur chemin, gens et bétail. Tous ceux qui furent mordus par eux jusqu'au sang furent pris d'une rage folle. Les femmes enceintes entrèrent en travail prématurément, et perdirent la raison. De Pâques à l'Ascension, ces événements prodigieux se produisirent presque toutes les nuits. La population était affreusement alarmée par ces prodiges. Et beaucoup se préparèrent à partir, vendirent leurs maisons, et se rendirent dans les districts ruraux, ou dans d'autres villes. Les hommes les plus intelligents considérèrent ces événements comme quelque chose de très extraordinaire, et les craignirent, et dirent, ce qui serait montré par la suite, qu'il s'agissait de présages pour des événements importants qui n'avaient pas encore eu lieu. Et le prêtre Andres, le dimanche de Pentecôte, fit un long et excellent prêche, et en conclusion de celui-ci, en arriva à la situation de détresse des habitants de la ville. Il leur dit de garder courage, de ne pas perdre leur excellente ville en l'abandonnant, mais plutôt de prendre le plus grand soin en toutes choses, d'être des plus clairvoyants contre tous les dangers, comme les incendies ou les ennemis, et de prier Dieu d'avoir pitié d'eux.

      

    1 Les prêtres étaient mariés à cette époque, le célibat étant réservé aux moines.  

     

    Illustrations : E. Peterssen
    Encadrement : Bouloute créations

     

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