-
Chapitre 27 : courtiser Brunehilde
Ils se préparèrent joyeusement pour leur voyage, et chevauchèrent par monts et par vaux vers la demeure du roi Budli, et lui demandèrent sa fille en mariage. Il prit leur requête en bonne part, si tant est qu'elle-même ne la refusât pas, mais il ajouta qu'elle était d'une telle élévation d'esprit qu'elle ne saurait épouser qu'un homme des plus puissants.
Alors, ils se rendirent à cheval jusqu'à Hlymdale, et Heimir les accueillit aimablement. Gunnar exposa sa demande. Heimir lui répondit qu'elle n'épouserait que celui qu'elle aurait librement choisi, et leur dit qu'elle séjournait à proximité, mais que seul serait agréé celui qui oserait chevaucher à travers la barrière de flammes élevée autour de sa halle. Alors ils se dirigèrent vers la demeure et le feu, et virent un château avec un toit d'or, et tout autour, un incendie vrombissant.
Gunnar montait Goti, Hogni Holkvi, et Gunnar poussa son cheval face aux flammes, mais l'animal recula.
Sigurd demanda alors : "- Pourquoi recules-tu, Gunnar ?"
Il répondit : "- Le cheval ne veut pas affronter ce feu. Prête-moi ton cheval Grani."
"- Bien sûr, de grand cœur", répondit Sigurd.
Alors Gunnar le monta et le plaça face au feu, mais ne sentant par Gramr sur son flanc, le cheval refusa de sauter à travers les flammes. Alors ils échangèrent leurs apparences, Gunnar et Sigurd, ainsi que Grimhild le leur avait enseigné. Puis Sigurd à la semblance de Gunnar monta et chevaucha Grani, Gramr en main, éperons d'or aux talons. Et Grani sauta vers le feu lorsqu'il sentit les éperons. Et le puissant rugissement s'amplifia alors que le feu brûlait plus follement, et la terre trembla, et les flammes s'élèvèrent jusqu'aux cieux, et nul n'aurait osé chevaucher ainsi qu'il le fit, même à travers les plus profondes ténèbres.
Puis le feu s'apaisa, et il sauta de cheval et entra dans la halle, ainsi que le chante la chanson :
"Le feu a brûlé des plus follement
Les domaines de la terre ont tremblé
Tandis que les flammes au dessus
Ont léché les plus bas des cieux.
Peu auraient osé,
Parmi les souverains des peuples,
Pousser leur cheval au milieu de ces flammes
Ou marcher à travers.
Alors Sigurd frappa
Grani de son épée,
Et les flammes s'éteignirent
Devant le roi.
Les flammes s'écartèrent
Devant la volonté du glorieux.
La bâtisse brillait, lumineuse,
Elle qu'avait autrefois possédée Reginn. "
Maintenant qu'il avait traversé les flammes, Sigurd arriva dans une belle demeure, où Brunehilde était assise.
Elle demanda : "- Qui êtes-vous ?"
Il dit se nommer Gunnar, fils de Gjuki, et ajouta : "- Vous m'êtes promise pour épouse, par l'accord et la parole de votre père et celle de votre père adoptif, et par le fait que j'ai chevauché à travers les flammes de votre incendie, ainsi que vous en aviez posé la condition."
"- Je ne vois pas bien, dit-elle, ce que je suis sensée vous répondre."
Debout sur le sol de la halle, Sigurd se pencha sur la garde de son épée, et dit à Brunehilde :
"- En compensation, devrais-je vous verser un important douaire en or et objets de prix ?
Elle répondit d'humeur sombre depuis son siège, où elle était installée telle un cygne sur les eaux, portant une épée à la main et un casque sur la tête, et sanglée dans une armure. "- O Gunnar, dit-elle, ne me parlez pas de telles choses, à moins que vous ne fussiez le premier et le meilleur des hommes. Parce qu'alors vous auriez à tuer ceux qui me courtisent, si vous en avez le courage. Je suis allée à la guerre avec le roi des grecs, et les armes étaient teintes de sang rouge, et j'aspire encore à de tels faits."
Il répondit : "- Oui, vous avez sans doute accompli de grands exploits. Mais puissiez-vous vous rappeler votre serment, au sujet de la traversée à cheval de ce feu, par lequel vous vous engagiez à suivre l'homme qui pourrait y parvenir."
Alors elle trouva qu'il disait vrai, et elle prêta attention à ses paroles, et se leva, et l'accueillit vraiment, et il resta là trois nuits. Et ils se couchèrent dans le même lit, mais il prit l'épée Gramr et la déposa entre eux. Alors elle lui demanda pourquoi il la plaçait là, et il répondit que de cette manière, il devrait épouser sa femme ou subir sa malédiction.
Alors elle ôta de son doigt l'anneau Fardeau d'Andvari, qu'il lui avait offert autrefois, et le lui donna, mais il lui rendit en échange un autre anneau du trésor de Fafnir.
Puis il retourna vers ses compagnons à travers le même feu, et lui et Gunnar changèrent à nouveau d'apparence, et ils chevauchèrent vers Hlymdale où ils racontèrent ce qui s'était passé pour eux.
Le même jour, Brunehilde revint chez son père adoptif, et lui dit, à lui en qui elle avait confiance, comment un roi était venu à elle. "Et il a chevauché à travers mon mur de flammes, et a déclaré qu'il était venu demander ma main, et s'est présenté comme Gunnar. Mais je me suis dit que seul le puissant Sigurd pouvait avoir accompli une telle prouesse, lui avec qui j'ai engagé ma foi sur la montagne. Et il est mon premier promis, et mon bien-aimé."
Heimir dit que les faits devaient se conformer à la nécessité, et qu'il était temps à présent que ceux-là appartinssent au passé.
Brunehilde dit : "- Aslaug1, ma fille et celle de Sigurd, devrait être élevée ici auprès de toi."
Aslaug et Heimir
Puis les rois rentrèrent chez eux, et Brunehilde partit chez son père. Grimhild accueillit les seigneurs avec joie, et remercia Sigurd d'avoir accompagné Gunnar. Et une grande fête fut organisée, avec de nombreux invités, et s'y rendirent le roi Budli et sa fille Brunehilde et son fils Atli, et les festivités durèrent plusieurs jours. Au cours de cette fête, Gunnar fut marié à Brunehilde. Et alors que la cérémonie touchait à sa fin, Sigurd fut traversé par le souvenir de toutes les promesses qu'il avait faites à Brunehilde, mais il laissa les choses aller leur cours tranquillement et en paix.
Gunnar et Brunehilde s'assirent ensemble au banquet, dans une grande joie, et burent un excellent vin.
1 Voir "La vie d'Aslaug"
Tags : gunnar, flammes, sigurd, brunehilde, grani, volsunga saga
-
Commentaires